Le petit chaperon bleu.
Le départ.
Il était une fois (toutes les histoires commencent par « il était une fois » n'est-ce pas ?) un petit garçon qui s'appelait... eh bien, non, on ne sait plus comment il s'appelait. On ne sait plus non plus si c'était un garçon ou une fille, parce que c'était il y a longtemps : cent ans, c'est long, hein ?
Bref, il ou elle vivait seul avec sa maman à Paris, le papa étant mort à la guerre. La maman, qui était couturière, lui dit un jour de Noël : « tiens, mon enfant, j'ai travaillé pour toi toute la semaine. Voici une jolie pèlerine bleue, une paire de sabots tout neufs et un solide bâton. Mais tu vois, je n'en peux plus, je n'y arrive pas. Alors j'ai pensé : tu es grand maintenant, tu vas aller dans le village où j'avais de la famille dans le Morvan. »
Puis de son tablier elle tira un trésor :une tablette de chocolat ! Elle la partagea en deux, lui en tendit une moitié et reprit : « chaque jour de ton voyage, nous en mangerons chacun un carré. Ainsi, je saurai où tu en es de ton parcours. »
Elle le serra une dernière fois sur son cœur et termina : « vas-y, maintenant, mon petit chaperon bleu ! » et pointant l'horizon du doigt : « n'oublie jamais : le Morvan, c'est devant ! » Ils s'embrassèrent et, bâton fermement en main, il fit demi-tour et partit droit devant.
Le voyage.
Il ne se retourna même pas car il savait bien que ce serait encore plus dur. Dans sa tête, une petite ritournelle lui revenait sans cesse : « tu n'as pas de pot de beurre, le loup ne te fait pas peur. »
Et il en rencontra des loups sur sa route, mais aussi et c'est bien heureux, des braves gens pour lui montrer le chemin, lui donner un coin pour dormir, un morceau de pain, un bol de lait. Tantôt il marchait, tantôt il sautait dans une carriole mais, jour après jour, avant de s'endormir, il croquait un carré de chocolat en repensant à sa maman. Au matin, invariablement, il demandait à ses hôtes d'un soir si c'était encore loin et toujours on lui répondait en pointant du doigt l'horizon : « le Morvan, c'est devant. »
L'hiver avait beau ne pas être trop méchant, le petit chaperon bleu se demandait parfois pourquoi il faisait si froid, si c'était lui ou si c'était la nature. Il avait quitté Paris depuis longtemps et la campagne devenait de plus en plus sombre à ses yeux, mais aussi l'horizon plus haut : et si c'était le Morvan ? Il traversa des bois et des forêts, contourna des étangs et des lacs. Dans sa poche, il ne lui restait plus que deux carrés de chocolat : enfin, se dit-il. Des chiens aboyaient à son passage ; il crut même apercevoir un vrai loup. Alors il fredonnait sa petite chanson « tu n'as pas de pot de beurre, le loup ne te fait pas peur. ».
Le jour de son dernier carré de chocolat, il arriva dans un joli village qui lui sembla aussitôt familier. Comme il ne savait pas lire, il se contenta de déchiffrer les lettres sur un écriteau : A...L...L...I...G...N...Y E...N M...O...R...V...A...N . Il sentit monter en lui le désir d'apprendre... Il fit encore quelques pas lorsqu'une femme sortit d'une maison et, le considérant de la tête aux pieds, le héla en ces termes : « hep, petit chaperon bleu, viens voir par ici. Tu cherches une maison ? En voici une ! ». Elle avait un drôle d'accent qui lui rappelait un peu celui de sa maman, mais en plus fort et employait des mots qu'il comprenait à peine. Elle tira de la poche de sa blouse une orange et ajouta : « tiens, mon petit, c'est pour toi ! Noël n'a pas dû être facile ». Ils entrèrent et la porte se referma sur eux.
Il était une fois (toutes les histoires commencent par « il était une fois » n'est-ce pas ?) un petit garçon qui s'appelait... eh bien, non, on ne sait plus comment il s'appelait. On ne sait plus non plus si c'était un garçon ou une fille, parce que c'était il y a longtemps : cent ans, c'est long, hein ?
Bref, il ou elle vivait seul avec sa maman à Paris, le papa étant mort à la guerre. La maman, qui était couturière, lui dit un jour de Noël : « tiens, mon enfant, j'ai travaillé pour toi toute la semaine. Voici une jolie pèlerine bleue, une paire de sabots tout neufs et un solide bâton. Mais tu vois, je n'en peux plus, je n'y arrive pas. Alors j'ai pensé : tu es grand maintenant, tu vas aller dans le village où j'avais de la famille dans le Morvan. »
Puis de son tablier elle tira un trésor :une tablette de chocolat ! Elle la partagea en deux, lui en tendit une moitié et reprit : « chaque jour de ton voyage, nous en mangerons chacun un carré. Ainsi, je saurai où tu en es de ton parcours. »
Elle le serra une dernière fois sur son cœur et termina : « vas-y, maintenant, mon petit chaperon bleu ! » et pointant l'horizon du doigt : « n'oublie jamais : le Morvan, c'est devant ! » Ils s'embrassèrent et, bâton fermement en main, il fit demi-tour et partit droit devant.
Le voyage.
Il ne se retourna même pas car il savait bien que ce serait encore plus dur. Dans sa tête, une petite ritournelle lui revenait sans cesse : « tu n'as pas de pot de beurre, le loup ne te fait pas peur. »
Et il en rencontra des loups sur sa route, mais aussi et c'est bien heureux, des braves gens pour lui montrer le chemin, lui donner un coin pour dormir, un morceau de pain, un bol de lait. Tantôt il marchait, tantôt il sautait dans une carriole mais, jour après jour, avant de s'endormir, il croquait un carré de chocolat en repensant à sa maman. Au matin, invariablement, il demandait à ses hôtes d'un soir si c'était encore loin et toujours on lui répondait en pointant du doigt l'horizon : « le Morvan, c'est devant. »
L'hiver avait beau ne pas être trop méchant, le petit chaperon bleu se demandait parfois pourquoi il faisait si froid, si c'était lui ou si c'était la nature. Il avait quitté Paris depuis longtemps et la campagne devenait de plus en plus sombre à ses yeux, mais aussi l'horizon plus haut : et si c'était le Morvan ? Il traversa des bois et des forêts, contourna des étangs et des lacs. Dans sa poche, il ne lui restait plus que deux carrés de chocolat : enfin, se dit-il. Des chiens aboyaient à son passage ; il crut même apercevoir un vrai loup. Alors il fredonnait sa petite chanson « tu n'as pas de pot de beurre, le loup ne te fait pas peur. ».
Le jour de son dernier carré de chocolat, il arriva dans un joli village qui lui sembla aussitôt familier. Comme il ne savait pas lire, il se contenta de déchiffrer les lettres sur un écriteau : A...L...L...I...G...N...Y E...N M...O...R...V...A...N . Il sentit monter en lui le désir d'apprendre... Il fit encore quelques pas lorsqu'une femme sortit d'une maison et, le considérant de la tête aux pieds, le héla en ces termes : « hep, petit chaperon bleu, viens voir par ici. Tu cherches une maison ? En voici une ! ». Elle avait un drôle d'accent qui lui rappelait un peu celui de sa maman, mais en plus fort et employait des mots qu'il comprenait à peine. Elle tira de la poche de sa blouse une orange et ajouta : « tiens, mon petit, c'est pour toi ! Noël n'a pas dû être facile ». Ils entrèrent et la porte se referma sur eux.
Imprimer | Commenter | Articlé publié par François Boussereau le 20 Oct. 19 |