Je vais parler de l'insaisissable matière tombant de ces masses blanches, grises, voire parfois noires, glissant dans le ciel, agitées par des vents invisibles.
Combien d'orages ont inspiré les poètes, entre vacarmes et trémolos passionnés?
Et combien de peintres se sont acharnés à la représenter dans de grandioses images, maniant pigments violets, violents, acides, sombres et menaçants?
Les paysans vénèrent l'ondée bienfaisante et craignent les grosses averses dévastatrices.
Les marchands d'ombrelles comme de maillots de bains la détestent, certes, mais on aime danser et chanter avec elle accompagnés de ses flic flac floc.
De froids chimistes parlent volontiers de paires d'atomes d'hydrogène combinées à l'oxygène dans cet état intermédiaire entre gaz et solide, et les physiciens, c'est l'apothéose, voient condensation et forces de gravité!
De son côté la météo, avec ses précipitations, ses ondées, ses averses, ses épisodes cévenols, grains et crachins, draches et rincées, essaye de varier la notion, coller davantage à la réalité.
Mais moi, je la vois venir, avec son oeil malin et rigolard: tombera? Tombera pas? Ici? Là? Eh bien, non, ce sera là-bas: elle s'en va sans lâcher sa larme, rien dire, ni regret ni pardon.
Pas gentille, la fille!
Elle préfère arroser des terres lointaines. La garce ne m'a pas fait grâce de sa farce.